jeudi 27 août 2015

Soyons sérieux ! Mettre en place un Learning Centre ; enjeux et problématiques (2011)

Parce qu'un malheur n'arrive jamais seul...
Soyons sérieux, encore une fois...


... Et parlons Learning Centre, en nous appuyant sur un rapport d'études paru en 2011. Il s'inscrit dans le cycle de réflexions nées du partenariat entre la Caisse des Dépôts* et les Présidents d'Universités ; ces travaux sont centrés sur le développement de l'"université numérique". Mettre en place un Learning Centre ; enjeux et problématiques reflète la tendance des établissements supérieurs à faire évoluer leurs bibliothèques vers un Learning Centre**.

Le but de ce guide est d'amener les présidents d'université à s'interroger sur la nécessité de mettre en place un Learning Centre, et de leur faire connaître les enjeux et les problématiques que cela soulève une fois qu'il se sont décidés à en faire pousser un. Notons-le bien : cet écrit propose des pistes de réflexion visant à anticiper au mieux l'aboutissement d'un tel projet, et non pas des informations pratiques. On ne se lance pas dans une telle aventure sans se poser quelques questions... Pour illustrer le flot d'idées exposées ici, les auteurs (qui relèvent de la Caisse des Dépôts) se sont appuyés sur des établissements précurseurs en la matière : les universités de Kingston, Lille 3, Poitiers, Avans, Glasgow, Lausanne, Londres... Leurs exemples sont des réussites, mais les erreurs de certains gagnent à être analysées pour ne pas être reproduites dans de futurs projets.


Dans une première partie intitulée "Un outil stratégique au service de l'établissement", on nous explique que chaque Learning Centre est différent car il est le reflet de la fac ou de l'école dans laquelle il est construit. C'est pourquoi sa place est stratégique pour les étudiants et pour les dirigeants au niveau pédagogique, social, numérique... Les chefs d'établissement ont tout intérêt à se l'approprier, car il donne une certaine image de l'établissement qu'ils gèrent ; il s'adresse à tous les services, et devient un lieu où il est possible de faire se rencontrer des personnels et usagers qui ne se croiseraient pas habituellement. Plus que la bibliothèque universitaire, le Learning Centre est LE lieu de cohésion et de travail pluridisciplinaire.

Bien que tout le monde soit concerné par ses modalités de fonctionnement, seule une équipe, composée d'un représentant des différents départements de la fac doit piloter le projet de construction et le déploiement.

Il y aurait donc autant de Learning Centres que de facs ; pourtant, quelques caractéristiques sont communes à tous :
- l'offre de service large et intégrée
- la volonté de proposer un lieu fonctionnel et convivial
- l'organisation efficace des ressources permettant une progression dans l'apprentissage.

Communiquer autour du Learning Centre est primordial, il doit être connu en interne comme en externe.


Que doit-on pouvoir trouver dans un Learning Centre, et qui est censé l'utilisée ? C'est ce qu'on essaie de savoir dans la deuxième partie du guide : "Un savant équilibre entre services et équipements". Propose-t-on la même chose à tous les usagers ? Comment agence-t-on le lieu physique et les services à distance pour répondre aux attentes ?  Dans un premier temps, il vaut mieux partir des besoins des usagers, qui sont essentiellement des étudiants. Souvent, ils recherchent un lieu à la fois calme et convivial pour travailler et échanger, et sont demandeurs d'outils méthodologiques. Mais les professeurs et les chercheurs doivent aussi y trouver leur compte, en déposant et récupérant des supports de cours, en ayant le matériel et les ressources nécessaires pour mener leurs recherches, en restant au courant des innovations pédagogiques, en ayant accès à des espaces dédiés (salles de conférence, de rendez-vous..). Enfin, le Learning Centre s'adresse aussi aux personnels, qui peuvent avoir des besoins de formation, à l'environnement économique et social local, et au grand public.

Une fois que ces besoins sont définis, les Learning Centres proposent généralement une offre orientée étudiants et profs articulée avec d'autres services qui pourront varier d'une fac à une autre (cafétéria, permanence du CROUS, espace orientation, librairies, banques..). Encore faut-il avoir un équipement de qualité qui permette tout cela. Même s'il ne faut pas oublier de mettre en place des services à distance, le lieu physique est primordial ; son implantation sur le campus et son agencement doivent faire l'objet d'une vraie réflexion. Il sera de préférence situé au centre de la fac, à un endroit où les étudiants passent beaucoup, mais pas forcément : si le LC sait se rendre indispensable par son offre, les étudiants se bougeront sans problème pour y aller. Attention ! Ce lieu convivial qui propose de nombreuses ressources peut vite être surchargé, faute d'avoir mal estimé le taux de fréquentation. Dans ce guide, il est conseillé d'anticiper l'amplitude horaire, de favoriser l'accessibilité, d'organiser les lieux en zones d'ambiance, de tenir compte du design en prenant garde qu'il ne nuise pas à l'accessibilité, de privilégier l'éco-conception... Evidemment, les installations informatiques, avec ou sans fil, doivent être pensées de manière à satisfaire quantitativement et qualitativement les usagers.




"Un modèle d'organisation privilégiant la flexibilité et la réactivité" 
On essaie ici de proposer un modèle d'organisation du Learning Centre, à supposer que ce soit possible.
Tout d'abord, il paraît judicieux d'organiser la coordination des différents pôles Sachant qu'il abrite au moins forcément le SCD et le département des TIC, et d'autres services en fonction des établissements, la question est de savoir comment faire collaborer efficacement les différentes entités : faut-il aller vers une conservation de l'autonomie de chacun, avec une claire séparation des services ? faut-il privilégier un fonctionnement selon un projet commun aux différents pôles, voire les faire fusionner ? Tout est possible en fonction du profil de l'établissement, des projets lancés, des objectifs à atteindre.

Alors comment savoir quel mode de fonctionnement sera le meilleur, sachant qu'on peut se tromper, et que pour cette raison, il faut se laisser une marge de rectification ? En se posant quelques questions incontournables : à qui le Learning Centre doit-il être rattaché, en fonction des "spécialités" qu'il propose ? Faut-il opter pour une gestion centralisée ou partagée ? Quels sont les objectifs fixés par chaque département concerné ?

L'accueil des publics s'organise, et plus seulement par les bibliothécaires, qui peuvent se consacrer à d'autres tâches. Au delà de l'accueil, on se partage le travail : chacun se voit attribuer des taches en fonction des services, afin de répondre aux besoins des usagers (méthodologie, mise à disposition des supports...). L'utilisation d'un organigramme précis (établissement d'une direction, d'adjoints, d'équipes...) semble difficilement contournable.

On en arrive justement au "rôle clé des personnels". L'évaluation des besoins en personnels nécessite une bonne connaissance du métier de bibliothécaire et de son évolution : aujourd'hui, le professionnel de la documentation et des bibliothèques effectue moins de prêt, se situe plus dans l'aide à l'usager, travaille en collaboration avec les équipes pédagogiques, élargit ses compétences aux TIC). De nouveaux métiers apparaissent, tels que "l'information specialist", qui lie la documentation et la pédagogie), ou les personnels "pros" de l'accueil et de la régulation des flux... Une fois qu'on sait ce qu'on a et ce qui manque par rapport à ce dont on a besoin, on peut se réunir pour définir le recrutement et parler des questions pratiques (quel nombre de postes demander et attribuer, combien d'heures de travail, quel salaire?).


La formation des personnels documentalistes et des "moins spécialistes" de l'information communication doit être mise en place, de façon à ce que tous puissent travailler ensemble et connaître les compétences des uns et des autres ; les métiers changent, et les carrières des uns et des autres doivent elles aussi pouvoir évoluer. Nécessité d'enseigner la base des fonctions de doc aux personnels des autres services.

"Une mise en place complexe"
Le projet de lancement d'un Learning Centre prend du temps : en moyenne trois ans. Cerner les coûts, établir des budgets distincts prend du temps. Pour prévoir au mieux et réserver un budget d'investissement et de fonctionnement, il faut pouvoir estimer le plus finement possible ce que coûte chaque secteur : équipement TIC, personnels, bâtiment... La démarche conseillée est de définir des grandes lignes de dépenses en fonction des secteurs, et d'affiner progressivement jusqu'à trouver un équilibre optimal. Des exemples de budgets alloués à différents Learning Centre nous sont donnés afin qu'on puisse avoir des repères.

Le financement de la construction des locaux demande une attention particulière : l'université doit-elle la prendre en charge et opter pour une maîtrise totale de la construction ? ou, compte tenu de la LRU, tenter de monter un contrat de partenariat pour se décharger en partie des frais ? Dans le deuxième cas, il faudra s'attacher à garder le contrôle des travaux de manière à obtenir le résultat souhaité. L'établissement reste le mieux placé pour savoir ce qui lui correspond. Pourtant, un contrat de partenariat est intéressant car il ouvre entre autres droit aux subventions publiques. Le financement de l'équipement numérique demande une réflexion particulière : il évolue vite, doit être renouvelé souvent et a un statut primordial dans le Learning Centre. Entre ressources propres, appui des collectivités et mécénat, le projet peut être financé de différentes manières.


Ce guide réalisé permettre aux chefs d'établissements de réfléchir en amont de la mise en place d'un Learning Centre réussit à s'adresser à tous les chefs d'établissements supérieurs prêts à se lancer dans l'aventure, malgré le caractère unique de chaque contexte, de chaque université. Il n'y a pas deux "Centres d'apprentissage" semblables, mais tous ont un certain nombre de points communs et doivent faire l'objet d'une réflexion : c'est un passage obligé (quels locaux, qui est impliqué, quel personnel embaucher, comment organiser le financement de la construction...).

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*Caisse des Dépôts et des Consignations :  institution financière publique qui effectue des missions d'intérêt général en investissant entre autres dans la construction de logements sociaux, dans le financement des PME, des universités..."Banquier du service public de la Justice et de la Sécurité Sociale", elle s'associe aux collectivités locales pour le développement du territoire.

** Learning Centre : littéralement, "Centre d'Apprentissage", le Learning Centre est, dans une fac, une structure unique qui regroupe des services et des ressources multiples autour de la culture, des TIC et de la pédagogie. C'est une sorte de bibliothèque augmentée qui met un point d'honneur à ce que l'usager _souvent un étudiant, un prof ou un chercheur, s'y sente bien et le reconnaisse comme un lieu de vie convivial et pratique autant que comme un espace de recherche et d'apprentissage.


Mettre en place un Learning Centre ; enjeux et problématiques. Caisse des Dépôts. Conférence des Présidents d'Université. 2011. 162 p. 


mercredi 19 août 2015

Tout ne s'explique pas... Route 225 - Chiya Fujino (2003) ; Mon chien est raciste - Audren, Clément Oubrerie (2015)

Entre deux tomes des Aventuriers de la mer et trois épisodes de Xéna la guerrière (oui oui, dans quelques jours, vous comprendrez pourquoi...), faisons une parenthèse romans jeunesse avec deux électrons libres tout aussi surprenants l'un que l'autre : Route 225 de Chiya Fujino, trouvé au Quai des livres à Bordeaux en même temps que Adieu la chair, il y a fort longtemps donc... et Mon chien est raciste d'Audren, découvert à Périgueux le même jour que Brainless. Les deux étaient des "seconds choix" dans mes craquages livresques, les deux ne m'ont pas déçue... même s'ils peuvent être tous deux assez déconcertants, à leur manière !  

Route 225 - Chiya Fujino (2003) 


Eriko a quatorze ans, des copines aussi frivoles qu'elle, des parents lourds, un petit frère de treize ans pré-pubère et immature (vivement qu'il ait des poils et qu'il arrête de pleurnicher !) ; en trois mots, une vie ordinaire de collégienne au Japon. Un soir, Daigo le petit frère ne rentre pas de l'école. Eriko ne s'inquiète pas outre-mesure, mais elle part tout de même à sa recherche pour éviter que leur mère ne se ronge trop les sangs. Elle avait bien raison : il n'y avait pas de quoi s'en faire ! Après avoir traversé la route nationale qui passe près de chez eux _la fameuse Route 225_, elle le trouve en train de rêvasser sur une balançoire du parc pour enfants. Tout va bien ! Mais au moment de rentrer à la maison, ils ne parviennent plus à retrouver leur chemin dans ce quartier qu'ils connaissent pourtant par coeur : tout a changé : les rues, les commerces, les personnes...
Quelle est cette ville inconnue ? Comment sont-ils arrivés là ? 
Quelques heures plus tard, ils regagnent enfin le cocon familial... et constatent que les parents l'ont déserté. 

Le sens du détail 
Daigo "le trouillard" prend peur et évoque assez rapidement la possibilité d'être passé dans un monde parallèle en sortant du parc. Eriko cherche une explication rationnelle à cette drôle de situation, car il y en a forcément une ! En vain... Entre angoisse et humour, les enfants cherchent à tâtons les frontières entre leur "nouvel" univers familier, si l'on peut dire, et ce qu'ils appellent déjà "leur vie d'avant". Oh, les différences se jouent à des détails tellement insignifiants qu'ils n'y prêteraient sans doute même pas attention si l'absence de leur parents ne venait pas leur rappeler l'incongruité de la situation : le joueur de baseball préféré de Daigo a pris de l’embonpoint, une prof sort du magasin discount du coin alors qu'elle va habituellement faire ses courses ailleurs... D'autres situations sont plus troublantes : Daigo rencontre une camarade de classe morte quelques mois plus tôt ; après un cours, Eriko est chaleureusement invitée à sortir par une copine avec qui elle était brouillée depuis longtemps. Plus tard, elle trouve dans sa chambre une lettre de réconciliation écrite par cette fille, lettre qu'elle est sûre de n'avoir jamais lue. Si bien que même Eriko la fière, la dure, l'espiègle grande soeur qui aime tant torturer son petit frère a quelques difficultés à faire belle figure.

Nous n'en saurons pas plus...
Mise à part l'incompréhensible absence des parents, les enfants souffrent surtout de ne pas pouvoir partager leur angoisse : ils savent d'instinct qu'ils seront pris pour des fous et ne tiennent pas à dévoiler leurs émotions _eh, on est quand même au Japon ! Du coup, ils vont même jusqu'à mentir à la voisine et aux proches pour masquer la désertion des adultes, et se replient sur eux-même ; ça aura au moins le mérite de les rapprocher. 

"Tu peux bien me le dire ! Eh, t'es déjà assez mystérieuse comme ça, pas la peine d'en rajouter !"
Xéna la Guerrière, saison 1, épisode 8 (Prométhée)
Ouais, j'aime bien mettre des Xéna partout sans raison en ce moment, vous voilà prévenus.

Par trois fois, Eriko et Daigo auront l'opportunité d'être en contact téléphonique avec leur mère, joignable seulement lorsqu'ils utilisent la carte téléphonique de Daigo (!), et encore... Par trois fois, pressés par le peu d'unités restantes, et par manque d'écoute réciproque, ils gâcheront leurs possibilités de dialoguer clairement et d'avoir des réponses aux questions qui les taraudent. On se croirait presque dans une histoire de Kafka... J'ai essayé dans un premier temps de quitter les yeux d'Eriko, narratrice de Route 225, pour lire avec les miens : est-ce un roman qui file la métaphore du détachement des parents que les enfants expérimentent à l'adolescence ? Parle-t-on du deuil de quelque chose ? d'une culpabilité ? mais laquelle ? Mais finalement, ces pistes ne m'ont amené à rien de convaincant _ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a rien à voir, d'ailleurs. Je crois que Chiya Fujino a surtout voulu écrire un texte étrange, fantastique et drôle sur la relation frère/soeur éventuellement, dans lequel on se résigne à accepter l'inexplicable pour composer avec. 

Visiblement peu connu, classé littérature jeunesse mais destiné aux plus de 15 ans, sans doute parce que le côté fantastique de l'histoire pourrait dérouter les plus jeunes, Route 225 est captivant jusqu'aux dernières pages ; on en espérerait presque une suite...

FUJINO Chiya. Route 225. 2003, Editions Thierry Magnier. Trad. Silvain Chupin. 254 p. ISBN 2-84420-240-3 





Mon chien est raciste - Audren ; dessins de Clément Oubrerie (2015) 




Une telle couverture ne peut que vous faire de l'oeil quand vous passez devant le présentoir : un titre qui suscite l'interrogation, une illustration mettant en scène un petit chien blanc lorgné de près par quelques bestioles plus imposantes et colorées dans des teintes gris-noir. Cette petite boule de poils qui crève l'image, c'est Minou, le chien abandonné que Maël et ses parents ont recueilli. Bon, son arrivée n'était pas vraiment prévue : au début, lorsqu'ils l'ont trouvé, ils ont fait du porte à porte dans l'immeuble pour savoir si quelqu'un le connaissait et/ou en voulait. Si tout le monde s'est accordé à dire que la bestiole était adorable, personne ne s'est proposée pour l'accueillir. Maël, 10 ans, a donc hérité du paquet pour son plus grand bonheur. Effectivement, les deux se sont tout de suite entendus à merveille et en quelques mois, ils sont devenus très attachés l'un à l'autre.

Pourtant, un jour, Minou montre les dents à Laurent, un camarade de classe de Maël et tente de le mordre. L'oncle et les cousins de Maël feront eux aussi les frais de ses montées d'agressivité insoupçonnées. Tout le monde est très étonné, car habituellement le chien est doux comme un agneau... En l'observant mieux, ses maîtres remarquent que Minou ne s'en prend qu'aux Noirs : pas de doute, leur chien est raciste. Mais comment est-ce arrivé ? Et que faire pour le "guérir" ? 

Pourquoi et comment un chien devient-il raciste ? Maël n'en saura rien, malgré ses recherches et son introspection. Car comme on dit, tel maître, tel chien... est-ce que lui-même ne serait pas un peu raciste sans le savoir ? Comment lui faire comprendre à Minou que sa conduite est stupide ? Sa haine des Noirs est-elle comparable à celle éprouvée par le père de sa copine Emma ? Ce type exprime ouvertement sa connerie à qui veut l'entendre et personne ne le contredit vraiment ; au pire, on l'évite. Loin de vouloir créer une atmosphère d'angoisse et d'incompréhension comme ce fut le cas dans Route 225 de Chiya Fujino, Audren et Clément Oubrerie ont cherché à aborder une question grave par le biais d'une situation cocasse, histoire de révéler toute l'absurdité du racisme. En effet, rien n'explique concrètement les comportements de l'animal... car c'est un animal ! Cela sous-entendrait que ceux du père d'Emma peuvent se justifier rationnellement ? Pas forcément ! On n'aura pas de réponses...mais on aura de quoi ouvrir le débat et se poser d'autres questions : que faire face au racisme ? Comment le prévenir ? Est-il efficace de le punir ? Le psy peut-il soigner cette drôle de maladie ?

Ce petit roman, accessible dès 9-10 ans à mon avis, mais largement exploitable en 6°, est décidément une très bonne idée. Il a été écrit par Audren et illustré par Clément Oubrerie, auteure et illustrateur dont je connais la renommé mais pas l'oeuvre _enfin pas encore, merci de ne pas me brûler vive ! et il peut être lu pour lui-même ou servir de support à un débat en classe. Les personnages sont attachants, la fin est mignonne et il ne fera pas pleurer dans les chaumières _et ça c'est appréciable, de nos jours. En bref, ce livre pour enfants vaut le détour.

Audren ; OUBRERIE, Clément. Mon chien est raciste. 2015, Albin Michel Jeunesse. Ill. 112 p. ISBN 978-2-226-315555-7


dimanche 16 août 2015

Fais tes devoirs de vacances avec Xéna ! Xéna la guerrière, Saison 1 (1995)


On est déjà fin août et tu te rends compte que tu n'as plus ouvert ton cahier de vacances depuis le 3 juillet ? Pas de panique, fous-y le feu une bonne fois pour toutes et remets-toi dans l'ambiance tranquillement en regardant la première saison de Xéna la Princesse Guerrière. De toute façon, avoue que t'avais pas franchement envie d'apprendre à faire le mini-radeau 100% déchets plastiques comme Marc et Julie t'y incitaient joyeusement depuis le coin de la page 32 !

Peut-être que tu ne vois pas vraiment où je veux en venir. Peut-être que tu ne sais pas qui est Xéna. Peut-être que tu le sais mais que tu n'as pas gardé un souvenir impérissable de ses aventures. Peut-être que tu te dis que tout cela n'est qu'un prétexte pour que je poste des photos de Xéna et Gabrielle en train de se lécher la tronche, histoire de prouver que AH VOUS VOYEZ BIEN !! qu'elles sortent ensemble !! Mais non. Les vrais fans s'en sont chargé depuis longtemps, extraits d'épisodes à l'appui. Cette série est juste très riche pédagogiquement et clôt parfaitement les vacances d'été.

Bon, il est possible que je mette quand même des photos sympas.
Autant joindre l'utile à l'agréable ! 




Xéna The Warrior Princess 

Tout d'abord, apprenez que Xéna n'est pas plus princesse que vous et moi. Née d'une mère tenancière et d'un père qui a vite mis les voiles, la jeune Xéna a grandi dans un village de Macédoine. Elle s'est émancipée dès la fin de son adolescence en prenant la tête d'une opération de défense de son village contre une attaque de brigands. Mais son armée de paysans de fait pas le poids et tous se font laminer ; elle perd son frère Lycos dans la bataille. Accusée par les survivants d'avoir provoqué le carnage, elle est chassée comme une malpropre et trouve refuge du côté des forces du Mal dans des circonstances qu'on découvrira au fil des saisons. Xéna devient alors la fameuse guerrière cruelle et assoiffée de sang qui effraie toutes la Grèce.

Or un jour, alors qu'elle vient de ravager des familles entières, sa conscience se réveille et elle décide de tout plaquer pour réparer ses fautes : la série débute à ce moment charnière de sa vie. Le chemin vers la rédemption promet d'être long et rude, car il est difficile de faire croire aux gens qu'on est bien intentionné quand on traîne des casseroles de meurtrière.

Résumé express (on va essayer...) 
C'est dans ces bonnes dispositions que Xéna arrive à Potidée, un petit village tout proche de se faire cramer : elle se donne pour mission de le sauver en s'opposant au guerrier qui l'assaille (Episode 1, Sins of the past / Le retour de Xéna). Après quelques coups et pirouettes spectaculaire, elle tape dans l'oeil de Gabrielle, une jeune paysanne promise à un mariage forcé qui voit en elle le modèle de la femme forte et indépendante. Elle décide de quitter sa famille et sa condition pour la suivre dans sa vie d'aventurière. Xéna ne voit pas d'un très bon oeil l'arrivée de cette chochotte qui ne connaît rien à la vie et qui pourrait la ralentir plus qu'autre chose, mais...bah, pourquoi pas.


Dans les premiers temps, on sentira l'attachement de Xéna à laisser Gabrielle "à l'abri" dans des tavernes pendant qu'elle fait ses affaires dans son coin ; d'où leur séparation dans l'épisode 2 (Chariots of War / Pour la grandeur d'Arès) où la guerrière sera blessée en protégeant une colonie contre l'attaque du belliqueux roi Cycnos, tandis que la blonde sympathisera avec le prince pacifiste. Gabrielle entre dans une période de grandes découvertes humaines et géographiques, et prend rapidement goût pour le shopping. En faisant son marché, pendant que Xéna discute équipement pour son cheval Argo, elle se fait capturer par des serviteurs de Morphée : jeune et belle, elle a le profil idéal pour devenir sa femme. (Episode 3, Dreamworker / Le passage des rêves). Sa pote ne pourra la délivrer de son bourbier qu'en empruntant le "passage des rêves", au risque de se faire piéger par sa propre conscience. Protéger, défendre plus qu'attaquer sont désormais les nouveaux principes de la femme au frisbee doré : son amie, un bébé orphelin gênant qu'une prophétie désigne comme successeur du roi Gregor, la petite-fille de Pandore _digne héritière de la boîte pour son plus grand bonheur (Episode 4, Cradles of hope / La boîte de Pandore). 



Ce qui ne veut pas dire qu'elle ne sait pas tirer profit de ses anciennes relations pour arriver au Bien et sauver une princesse dont la mort déclencherait une guerre entre deux pays (Episode 5, The Path Not Taken / La mauvaise pente). Mais la gentillesse ne paie pas toujours, et elle l'apprendra à ses dépens dans l'épisode 6 (The Reckoning / Le Procès de Xéna) : en voulant soigner un groupe de paysans attaqués par un mystérieux guerrier vêtu de noir qui s'évapore après l'altercation, elle se fout du sang partout, si bien que les familles des victimes la prennent pour l'agresseur et la coffrent. A l'occasion, Gabrielle ramènera sa fraise et y prendra goût par la suite : en voulant montrer sa science à des villageois prêts à tout pour sortir de leur désarroi, elle libère trois Titans de leur prison de pierre... en croyant bien faire, évidemment (Episode 7, The Titans). Heureusement, elle arriveront à sauver leur peau et s'amèneront pleines de fraîcheur pour briser les liens de Prométhée enchaîné à sa montagne (Episode 8, Prometheus) et sauver la mort des griffes du roi Sisyphe (Episode 9, Death in chains / Sisyphe et la mort). Au fil de leurs aventures, elles rencontreront d'autres femmes fortes : la tribu des Amazones, dont Gabrielle deviendra princesse en remerciement d'avoir tenté de protéger l'une de leurs membres _déjà morte  (Episode 10, Hooves and Harlot / Les Amazones). Puis un mystérieux Loup Noir masqué, farouche opposant du cruel roi Xerxès qui cherche en vain à l'identifier (Episode 11, Black Wolf / Le Loup Noir). Hélène de Troie elle-même fera appel à leurs services (Episode 12, Beware Greeks Bearing Gifts / Méfie-toi des Grecs) et ensemble elles découvriront les joies du fameux cheval de Troie.



Au début du treizième épisode (L'Académie d'Athènes) Gabrielle s'émancipe et quitte Xéna pour participer à un concours du meilleur aède. Si elle gagne, elle pourra faire partie de l'Académie d'Athènes et devenir une sorte de poétesse agréée.

Photo trouvée ici, merci à eux !
Malgré son succès, elle aura vite la nostalgie de sa vie d'aventurière passée à courir derrière le cheval de son héroïne et les deux dures à cuire n'hésiteront pas à s'allier à des meurtriers pour partir à la recherche du trésor des Sumériens (Episode 14, A fistful of dinars /Pour une poignée de dinars)... C'est toujours moins risqué qu'assurer la protection de son sosie, une craintive princesse (Episode 15, Warrior... Princess / Les deux princesses).

La fin de la saison joue sur les frontières incertaines qui séparent le monde des vivants et celui des morts ; Xéna sera sollicitée par Marcos, son copain tué juste après être revenu dans le droit chemin pour aller rétablir l'ordre dans le Tartare. En effet, rien ne va plus depuis que le dieu Hadès s'est fait voler son casque d'invisibilité (Episode 16, Mortal beloved / Retour parmi les mortels). Dans l'épisode 17 (le Roi des voleurs / The Royal Couple of Thieves), on rencontre pour la première fois un personnage qu'on reverra par la suite : Autolycos, le roi des voleurs. Xéna s'adresse à lui pour récupérer un trésor volé par le guerrier Malthus et le remettre à ceux à qui il appartient. Ne va-t-elle pas regretter son choix ?

Puis vient la crise existentielle de Gabrielle ; il fallait bien qu'elle arrive ! Après avoir manqué se se faire empaler par tout une charrette de pieux aiguisés, elle se demande si la vie d'aventurière n'est pas un peu trop risquée finalement, et elle décide de rentrer chez elle faire le point (épisode 18, The Prodigal / La défense du village)

Xéna et Gabrielle mourront chacune leur tour dans les ultimes épisodes de la saison, mais ce ne sera que pour mieux ressusciter !


Révise ta mythologie...

Le cyclope aveugle
Episode 1, Sins of the past / Le retour de Xéna
Dans le premier épisode, Gabrielle la paysanne à l'imagination et à la répartie déjà foisonnantes choisit donc d'accompagner Xéna dans ses aventures, comme je vous le disais plus haut. Mais la guerrière s'y oppose tout d'abord et quitte Potedaia seule pour se rendre à Amphipolis. De son côté, Gabrielle s'accroche à son projet et se lance à sa poursuite. L'une après l'autre, elles vont faire la rencontre d'un cyclope aveugle qui nous rappelle vite fait le Polyphème de L'Odyssée : c'est un géant, il n'a qu'un seul oeil (enfin, il avait...), il est berger, il aime la chair humaine et il a une fâcheuse tendance à se faire embrouiller facilement. On apprend que c'est Xéna qui lui a crevé son oeil unique pour qu'il soit moins dangereux face aux populations. En le rendant aveugle, elle a donné au cyclope une occasion de se racheter et de changer de régime : puisqu'il ne peut plus attraper d'hommes, il n'a qu'à se mettre à la viande animale qu'on lui donnera en échange de services. L'ogre n'ayant pas du tout envie de tirer profit de l'occasion, elle l'abandonne dans un méprisant "t'as qu'à crever de faim", ou quelque chose comme ça. Un peu plus tard, Gabrielle parviendra à l'embobiner en lui faisant croire qu'elle part chasser Xéna et qu'elle compte bien la lui rapporter en petit morceaux une fois qu'elle l'aura tuée.

Petit résumé de la situation trouvé sur un blog de fan 

Arès, dieu de la guerre et boulet de l'Olympe 
Pour les Grecs, Arès est le dieu de la guerre ; mais au contraire d'Athéna sa demi-soeur, il n'est pas très populaire et aime semer la discorde pour déclencher des combats. Et il est clairement inférieure à la déesse née toute armée, puisque la légende dit qu'elle l'aurait entre autres caillassé gaiement, enfermé dans une jarre pendant plusieurs mois et qualifié de "mouche à chien". Plus communément appelée "mouche à merde". S'il porte fièrement les attributs du guerrier aussi bien dans Xéna que dans les textes antiques, il montre également dans cette première saison des signes de faiblesses faisant de lui un dieu puissant mais pas invincible. D'ailleurs, sa grande force semble être de jouer sur l'illusion pour arriver à ses fins : il aime se rendre invisible ou prendre la forme d'une personne en particulier ; un guerrier qui ne combat que quand la ruse a foiré.

Zeus en train de calmer les jeux dangereux de ses gosses.
Athéna, à gauche, le pied avancé, est prête à envoyer sa lance, tandis qu'Arès, à droite, a levé le bouclier pour parer le coup.
Elle était donc en bonne voie de le défoncer.
(Cratère à volutes de Nicosthénès)

Première apparition d'Arès - S1E06, The Reckoning
Bien sûr, Arès aimerait bien se taper Xéna mais elle n'est pas vraiment intéressée, et se joue de lui dans l'épisode 6. A partir de là, ils deviennent ennemis.

Les Titans 
Lors du septième épisode, Gabrielle s'embrouille avec Xéna car elle aimerait bien être prise au sérieux, de temps en temps. Elle part seule de son côté pour ruminer son mécontentement, et se retrouve dans une caverne avec toute la population d'un village en proie à des inondations s'est rassemblée. Leur dernier espoir d'avoir une vie meilleure est d'arriver à réveiller les trois Titans figés dans la pierre pour qu'ils leur viennent en aide. Or, la formule magique censée les libérer de leur prison de roche n'a aucun effet sur eux ; peut-être est-elle mal prononcée ? En effet, Gabrielle s'y essaie, et, capable de placer les bonnes intonations sur le texte, elle parvient à libérer Crios, Théia et Hypérion. Les trois grandes gigues manifestent aussitôt leur reconnaissance auprès de la jeune fille qu'ils considèrent comme une déesse. Que va-t-il se passer quand ils vont découvrir qu'elle n'est qu'une simple humaine ?


Apparemment, les douze Titans gouvernaient le monde avant qu'un combat contre Zeus ne leur enlève le pouvoir. Ces enfants d'Ouranos et de Gaïa avaient la forme de géants capables d'écraser les humains sous la savate, d'où la conservation du mot "titan" dans le langage courant pour désigner quelqu'un de balaise ; c'est bien le cas dans Xéna. Mais si les scénaristes ont tenu compte du mythe, ils ont aussi pris quelques libertés : les Titans sont douze, et même s'ils se reproduisent entre eux, il n'est pas possible que Hypérion puisse menacer les villageois de réveiller des "centaines" de congénères bloqués dans la caverne. L'emprisonnement dans la roche pour qu'ils soient hors de nuire est aussi curieux quand on sait qu'après leur défaite contre Zeus, les Titans sont tous expédiés vers le Tartare _autrement dit, les Enfers. Enfin, aucune mention du meurtre de Crios par Hypérion n'est faite nulle part à ma connaissance, mais j'ai peut-être mal cherché.

Prométhée est un titan savant plutôt mal vu des autres divinités à cause de sa tendance à piquer des trucs intéressants aux immortels (genre le feu) et à partager sa science avec les hommes. C'est ce que la mythologie retient de lui, et c'est ce que Héra lui reproche dans l'épisode 8 (Prometheus) qui lui est consacré ; a ceci prêt que le grand bonhomme se voit aussi garant de la faculté de guérir que chaque humain possède en lui. Du coup, lorsqu'il se retrouve enchaîné au Mont Volcan, non seulement les hommes perdent le feu, mais ils deviennent en outre extrêmement vulnérables. Cette liberté prise par rapport au mythe n'est pas la seule, puisque ici ce n'est pas Hercule qui s'impose comme unique sauveur, mais l'astucieux binôme qu'il forme avec Xéna.


Toujours Xenites.fr pour la source...


Hercule est le fameux héros grec qui, au moment où on le rencontre dans la série, a déjà effectué ses douze travaux pour la plus grande joie de Gabrielle. On ne le voit que dans ce fameux épisode 8, donc nous n'en ferons point des caisses sur lui aujourd'hui. La postérité ne retiendra pas qu'il s'est tapé Xéna _grande oubliée de l'histoire, décidément !

Neveu et chauffeur (de char) de Hercule, Iolaus devient ici le meilleur pote un peu loser du héros. Le même en moins bien. Celui qui aurait pu se taper Xéna s'il n'y avait pas eu l'Autre. Du coup, il se rabattra sur Gabrielle, adepte des seconds couteaux comme nous allons le voir.  

Héphaïstos est entre autres dieu du feu et de la métallurgie, accoucheur de Zeus à l'occasion lorsqu'un enfant armé pousse dans son crâne (Athéna, faut toujours qu'elle se fasse remarquer celle-là...). On ne le voit pas dans cette saison mais on sait qu'il est assez bon forgeron pour fabriquer de pures épées aux pouvoirs exceptionnels.

Les scénaristes ont bien fait la fête avec le mythe de Sisyphe, qui est dans l'épisode 9 un bon roi qui emprisonne la mort chez lui pour pouvoir vivre éternellement aux côtés de sa femme, la sage Karis. C'est presque mignon. La légende veut pourtant que Sisyphe ait été un voleur invétéré et grave insolent et qu'il ait un jour fait main basse sur Thanatos_ et non sur Célesta, soeur du dieu Hadès et messagère de la mort. Suite à cette bonne blague, il fut condamné à une tâche laborieuse qu'il ne parvint jamais à accomplir : pousser un énorme rocher au sommet d'une colline. Point de Karis dans l'héritage culturel , et point de pierre à traîner à la fin de l'épisode.

Hadès le dieu de la mort fait un passage rapide au début de l'épisode 9 pour solliciter Xéna afin qu'elle l'aide à libérer sa soeur Célesta des griffes de Sisyphe. Il apparaît sous la forme d'un jeune homme bien coiffé et d'une surprenant légèreté pour le ministère qu'il représente...

Le peuple de femmes guerrières que composaient les Amazones prône, dans Xéna, l'égalité des sexes et les droits des femmes à l'éducation et à l'accès aux hautes fonctions. Dit comme ça, c'est beau. Mais cette micro société exclut quand même farouchement les hommes et il est dit dans plusieurs encyclopédies que les Amazones avaient pour coutume d'estropier leurs enfants garçons dans le but de les affaiblir et en faire des serviteurs. Elles pouvaient également se trancher un sein pour tirer à l'arc plus facilement. Ces petits détails quelques peu barbares ne sont pas évoqués dans la série ; pourtant, même si elles sont mises en scène sous leur profil le mieux édulcoré, les Amazones conservent à nos yeux un petit côté antipathique et cruel... Dans cet épisode, on a presque envie de prendre partie pour le peuple des Centaures, ces créatures à tronc humain et corps de cheval qu'elles n'apprécient guère.


Apprends les gestes de premier secours avec Xéna et Gabrielle, son assistante-pansements

Déjà, vérifie que Prométhée n'est pas enchaîné à une montagne, quelque part dans le monde ; si ce n'est pas le cas, les conseils qui vont suivre ne te serviront à rien ! 

Retire une flèche plantée dans ton ventre (sachant qu'elle ne t'a pas traversée)
Episode 2. Partie chercher un gué pour faire passer le canasson à l'aise, Xéna tombe sur un village en proie à une attaque menée par les hommes de Cycnos. Elle sauve un enfant d'une mort certaine, le rend à Darios, son père, se retourne, arrête d'une poigne de fer deux flèches qui lui étaient destinées et se prend la troisième dans le bide. Ah, si Xéna avait eu trois mains... Darios recueille la blessée mais ne sait pas bien quoi faire pour arrêter ses souffrances. Alors, elle lui file la technique :
1. Mettre un fer à chauffer
2. Si la flèche n'a pas traversé le corps (ce qui est le cas ici), l'enfoncer assez profond dans le bide pour qu'elle ressorte dans le dos.
3. Casser la flèche en deux
4. Retirer des bouts de flèche de chaque côté
5. Cicatriser tout ça au fer rouge, pchhhhhhhhhhh (c'est normal si ça fume)



Plante un roseau dans le cou d'un mec qui s'est pris un poignard pour qu'il puisse continuer à respirer 
Episode 8. On est au tout début de l'histoire ; Xéna et Gabrielle se font attaquer de bon matin par des brigands. L'un deux envoie son poignard sur la princesse pour l'épingler mais elle l'esquive d'une roulade digne d'une pintade en quête de liberté et c'est son copain qui prend. Alors Xéna allonge le mec sur le dos et réveille son aide-soignante de choc _Gabrielle, donc

1. Allonger le mec et faire en sorte qu'il ne bouge pas trop.
2. Prendre "le petit couteau" dans le sac
3. Faire une incision dans la gorge
4. Planter un roseau dedans
5. Mettre un pansement, et roule ma poule ! Elle l'a fait "plein de fois, ça marche tout le temps".



Soigne un centaure qui s'est déplacé une cote 

1. Endors-le localement en lui frappant le torse
2. Prends un bon couteau
3. Plante le couteau sous l'aisselle, au niveau de la cote concernée
4. Mets ta main dans la plaie, chope la cote et replace-là correctement
5. Recouds tout ça avec du fil et une aiguille



Apprends à te défendre avec ce que tu as sous la main

Tue un centaure lancé au galop en trois coups de bâton
(Méthode de l'Amazone Ephiny)
1. Mets un coup dans l'articulation d'une papatte avant pour le bloquer dans sa course :


2. Quand il commence à se casser la gueule, tu lui pètes les jambes par derrière histoire qu'il ne se relève plus...



3. Pour finir, brise lui le cou !

"La mort est immédiate.. s'il a de la chance !"

Débloque ton âme de poète

Très tôt dans la saison, Gabrielle s'impose par la parole : elle sait embobiner son monde _et le cyclope, conseiller, convaincre _Xéna de l'accepter... plaider une cause... Dans les tavernes comme parmi les étudiants de l'Académie d'Athènes, les histoires qu'elle raconte récoltent à coup sûr un grand succès. Mais à partir de l'épisode 7, lorsqu'elle reprend la jeune fille chargée de lire la formule magique qui libérera les Titans de leur prison de pierre, on découvre chez elle une culture littéraire et stylistique insoupçonnée. Plus tard, Talos le blondinet malade de l'épisode 9 se targuera d'avoir rencontré une fille "qui connaît Sophocle par coeur". Comment la petite paysanne a-t-elle eu accès aà tant de savoir ? Sans doute en autodidacte ! Mais sa plus grande source d'inspiration et de bons mots au quotidien, c'est Xéna !

Alors, faites comme elle et débloquez votre côté poète, même si a priori rien ne vous destine à en avoir un. N'oubliez pas :


  • "L'important, c'est de mettre de l'emphase sur chaque première syllabe." Episode 7, les Titans.






  • "L'art ne doit jamais être sacrifié pour respecter la loi ou le règlement" Episode 13, l'Académie d'Athènes. 


Dixit le juge qui repêche Gabrielle après sa disqualification au concours du meilleur aède (pour avoir feinté à l'entrée)


  • "Regarde comme la surface de l'eau est lisse..."


Dans cette première saison de Xéna, on nous présente par deux fois cette scène assez drôle dans son genre où la guerrière lance un caillou dans un lac et lit une métaphore de sa vie dans les eaux agitées par les ricochets :

"J'étais comme ça autrefois"
"Et ensuite... l'eau fait des remous et des rides..."
"C'est encore moi."

"Mais avec un peu de patience, les rides et les remous vont disparaître ! La surface redeviendra lisse !"
"Mais le caillou est au fond. Il fait maintenant partie du lac. " 
"Le lac peut paraître comme avant mais il est à jamais changé."
Quelle philosophe cette Xéna !! on en a presque la tête qui fume à l'issue des 40 minutes !!

Ah, nostalgie... 

Mon arrière grand-mère adorait Xéna. Elle ne loupait jamais un épisode et battait des mains à chaque fois que Lucy Lawless poussait son fameux cri de guerre souvent suivi d'une pirouette, ou lorsqu'elle lançait son chakram. Je crois qu'elle était encore plus admirative que Gabrielle, à supposer que ce soit possible.

"Oh, quand même ! Cette femme !"

A l'époque, les aventures du duo de choc ne m'intéressaient pas beaucoup, et je me foutais pas mal de savoir si Xéna et Gabrielle couchaient ensemble ou pas. Mais l'enthousiasme de la mémé me faisait tellement rire ! Les luttes paysannes à coups de fourche dans le cul des guerriers devaient lui rappeler sa jeunesse, ou je ne sais pas. Parfois, elle montait le son de la télé à fond et j'entendais le choc des épées depuis la cour, malgré la porte fermée. Dans les massifs, les poules dressaient la tête et se raidissaient sous l'effet de la surprise, craignant un danger immédiat ; mais leur angoisse était de courte durée : le temps que je monte la tête au carreau pour voir où elle en était, Xéna avait déjà défoncé tout le monde.


Mise à jour août 2019 : Écoutez le super podcast Gazon Mardi qui est en train de nous décrypter les épisodes de la saison 1 actuellement ! 

Xéna la guerrière 
Saison 1 - 24 épisodes 
Sam Raimi / Robert Tapert 
1995 



mardi 11 août 2015

Grand-mère Brenda

Grand-mère Brenda avait attrapé le coryza alors qu'elle était encore poussin.
Elle s'en était tirée, mais la maladie avait laissé les traces indélébiles sur son visage.

lundi 10 août 2015

Soyons sérieux ! Valoriser le patrimoine culturel de la France - Françoise Benhamou ; David Thesmar (2011)


Parce qu'il ne faut pas perdre la main !



Le passage à Paris de l'exposition itinérante "Lascaux 3" m'a fait repenser à un rapport de 2011 sur la valorisation du patrimoine dont on avait parlé en formation interdisciplinaire, pendant mon année de stage. Pour rappel, le projet "Lascaux 3" vise à faire connaître de manière virtuelle une partie de la grotte qui n'est pas accessible au public ; pour tous ceux qui n'ont pas la possibilité d'aller voir de fac-simile de la grotte situé dans les fins fonds du Périgord, juste à côté de la vraie, c'est l'occasion de découvrir une facette de l'art et de la culture. Accessoirement, les reproductions de parois et d'oeuvres d'arts, les vidéos, les photos et les activités proposées aux visiteurs peuvent aussi donner envie d'y aller pour de vrai. Et à mon sens c'est justement un exemple de valorisation du patrimoine.

En 2011, Françoise Benhamou, spécialisée dans l'économie de la culture, et David Thesmar, économiste, ont dressé un rapport de l'implication de l'Etat dans la valorisation du patrimoine culturel en France. Ce travail d'étude, intitulé très précisément Valoriser le patrimoine culturel de la France, a été mené pour le compte du Conseil d'Analyse Economique*, et a été présenté à Frédéric Mitterrand, le Ministre de la Culture de l'époque. Il est consultable sur le site de l'ENSSIB.


Le rapport en question 

Les auteurs de ce rapport veulent démontrer que l'Etat a tout intérêt à s'investir dans la protection et la mise en valeur du patrimoine culturel, car si elles engendrent forcément des dépenses, elles peuvent aussi être un tremplin économique majeur. On pense notamment aux secteurs du tourisme et de la culture, pour lesquels l'augmentation de la fréquentation d'un lieu protégé aura un impact sur la création d'emplois et pourra développer l'attractivité de la région. Cette participation des politiques publiques sera bien sûr financière, mais pas uniquement, et pas exclusivement sous forme de subventions distribuées aux musées et aux autres lieux de culture. Pour pouvoir participer efficacement à la promotion du patrimoine et être en mesure de faire des propositions, il convient tous d'abord de savoir ce qu'on entend par ce terme, puis de l'observer en tant que secteur de l'économie à part entière.



Dans une première partie, on nous apporte une définition du patrimoine, qu'on résumera simplement ici à "ce qu'une Nation entend conserver pour les générations futures". On distingue notamment le "patrimoine tangible" (bâtiments, collections nationales, musées, oeuvres, fonds, quartiers de villes, sites naturels, sites archéologiques...) du patrimoine immatériel (savoir-faire, métiers d'art...).

Françoise Benhamou et David Thesmar nous apprennent comment procèdent les experts, le public et l'UNESCO pour qu'un monument ou un lieu particulier devienne (ou pas) "un morceau" du patrimoine culturel, puisque ce n'était pas sa fonction première : on ne construit pas un bâtiment dans l'idée qu'il sera classé plus tard. Bien qu'on ait du mal à se la représenter, et bien qu'on reconnaisse ses valeurs scientifique, historique, scientifique, le patrimoine est un bien économique ; il a une valeur marchande. Par exemple, les monuments gagnent en valeur lorsqu'ils sont classés. Mais c'est surtout l'interaction patrimoine - tourisme qui est déterminante pour la consommation des visiteurs et pour l'emploi dans le secteur du tourisme.


Pourquoi l'Etat devrait-il intervenir dans le fonctionnement économique du patrimoine ? On sait que, de manière plus générale, sa participation est de rigueur lorsqu'une entreprise ne peut plus fonctionner seule, de façon à ce que cette entreprise puisse de nouveau suivre la loi du marché. Est-ce le cas du patrimoine culturel français ? Oui, pour deux raisons notamment : les monuments culturels ne sont pas en concurrence, donc la logique de marché ne fonctionne pas ; ensuite, on ne peut pas compter seulement sur les visiteurs d'un musée pour le financer sur la durée. Une aide de l'Etat est donc nécessaire, et une réorganisation d'une collaboration tourisme - culture est à envisager : en effet, le secteur du tourisme peut bénéficier du succès d'un monument historique, d'un parc naturel... mais il est rare qu'il participe à son entretien. Des partenariats sont à mettre en place de ce côté-là. Si les subventions des lieux de culture sont incontournables, d'autres dispositifs, moins directs, ont déjà été expérimentés pour assurer la pérennité des sites : aides pour la formation aux métiers très spécialisés du secteur de la culture (comme la restauration d'objets, par exemple), offres pour les publics qui n'ont pas accès aux musées, soit parce qu'ils n'ont pas appris à avoir la curiosité nécessaire pour s'y intéresser, soit parce qu'ils ne les connaissent pas, soit parce qu'ils n'ont pas de quoi se payer la visite.


Je ne peux résister à vous faire partager la visite de Marion Cotillard et de sa classe au Musée des Accidentés de la route. (Dikkenek, 2006)


Ils demeurent insuffisants, faute d'une évaluation suffisante des besoins financiers des lieux classés, et des besoins culturels des publics. Alors, les auteurs du rapport proposent 11 groupes de "recommandations" pour changer la donne :

Recommandations 1 - Il paraît important de mesurer les dispositions de chaque citoyen à payer pour l'entretien du patrimoine ; ces chiffres seront rendus publics.

Recommandations 2 - La transparence des données chiffrées et leur mise à disposition auprès des publics donnera une meilleure visibilité au patrimoine : où se trouve ce musée ? quels sont les autres monuments visibles à proximité ? quel est le prix de l'entrée ? combien de visiteurs par an ? quelles aides de l'Etat ? quelles dépenses à l'année ?

Recommandations 3 - Fixer la taxe de séjour à 6% diminuera la sollicitation du contribuable.

Recommandations 4 - Rendre les tarifs flexibles en fonction des visiteurs (moins cher s'il est membre de l'UE, s'il a peu de moyens) mais aussi des périodes de l'année, des heures...Cela permettrait de réguler la fréquentation des stars du patrimoine et de permettre aux gens de mieux les apprécier.. et de leur donner envie de revenir.

Recommandations 5 - Informer, communiquer pour faire connaître les sites moins connus du grand public, et les rendre attractifs : on utilisera au maximum Internet bien sûr, mais on n'oubliera pas l'importance de l'éducation culturelle à l'école ! Les partenariats entre l'école et le patrimoine sont à consolider.

Recommandations 6 -  On veillera à donner aux collectivités locales plus de responsabilités concernant les monuments classés qu'elles abritent ; une simplification des procédures d'acquisitions et de transferts des oeuvres serait bénéfique à tous.

Recommandations 7 -  Il existe une Fondation du Patrimoine, peu médiatisée, qui mériterait d'être mieux prise en considération : en effet, son but est de protéger le patrimoine rural non reconnu. Le développement du mécénat est aussi une solution envisageable.

Recommandations 8 - L'accès à l'art et à la culture peut aussi passer par la numérisation : aussi est-il important de mettre un maximum d'oeuvre sur support numérique et de les décrire assez bien pour qu'on puisse en profiter au mieux via la recherche informatique.

Recommandations 9 - Comme on l'a vu plus haut, les métiers d'art font partie du patrimoine immatériel et doivent eux aussi être mis à l'honneur ; cela passe par la reconnaissance de leur autonomie, l'ouverture à l'export et la mise en place de formations d'excellence... mais moins élitistes.

Recommandations 10 - Les marques, telles que le Louvre (Le Louvre-Lens, le projet Louvre Abu-Dhabi...) gagneront à être valorisées.

Recommandations 11 - Il est important de ne pas isoler les monuments de leur environnement. Ils ne prennent de sens que si on les observe dans leur cadre dynamique ; par conséquent, des liens solides entre le monument, la ville, les commerces et les industries locales peuvent être noués.



En conclusion
=> La dimension économique de la culture peut devenir une force si on sait s'en servir : le patrimoine a une grande importance dans l'attractivité d'un pays et génère de la création d'emploi dans le secteur du tourisme. Au delà des aides financières qu'on peut attendre de l'Etat, c'est sur la formation et la sensibilisation au patrimoine et à ses enjeux que devrait se concentrer la participation publique.


=> Ma conclusion :  les sous de l'Etat ne sont pas une solution durable pour les musées ! C'est juste de l'assistanat ! A la place, il vaut mieux pomper le secteur du tourisme, les visiteurs, et attendre que les gens sensibles à leur culture aient envie de jouer les mécènes ! Ben oui, c'est tellement mieux !
Désolée si j'ai rien capté, enfin tant mieux surtout, mais c'est comme ça que je comprends ce rapport. 

Ce rapport est suivi de deux commentaires et de trois compléments sur lesquels il sera intéressant de revenir ultérieurement... 

BENHAMOU, Françoise ; THESMAR, David. Valoriser le patrimoine culturel de la France. 2011. La Documentation Française. Coll. "Les rapports du Conseil d'analyse économique. 162 p. ISBN 978-2-11-008595-5

__________________

Conseil d'analyse économique : composée d'économistes de tous bords, cette instance sert à réaliser des analyses économiques dans tous les domaines afin de conseiller le Premier Ministre. Ses travaux sont rendus publics.

samedi 8 août 2015

Les Aventuriers de la Mer - 6 - L'éveil des eaux dormantes - Robin Hobb (2006)


Voilà deux ans que j'ai interrompu brutalement ma lecture des Aventuriers de la Mer, au beau milieu du tome 6, "L'éveil des eaux dormantes". Plutôt vers la fin, d'ailleurs. A présent que je suis assez costaud pour m'y remettre, j'ai bien l'intention de poursuivre sur ma lancée et de me manger les trois derniers volumes de la série.   




En reprenant le livre au début du chapitre 13, la frustration s'est mêlée à l'agacement : je n'ai rien compris à ce que je lisais, parce que je ne savais plus qui était qui, qui était où, je confondais les vivenefs et leurs capitaines, les îles, les contrées. Il allait donc falloir que je relise les douze premiers chapitres pour m'y retrouver un minimum ! Ca ne m'emballait pas, mais on a quand même vu des corvées plus pénibles que se refaire un roman de Robin Hobb !  

Effectivement, je ne sais toujours pas quelle magie utilise cette fille _et ses traducteurs_ pour capter aussi fabuleusement la totalité de l'attention de son lecteur, mais le fait est qu'il se passe quelque chose quand j'ouvre un de ses romans. Ou elle connaît les mécanismes du cerveau et appuie sur les bons boutons pour qu'on accroche à sa narration, ou elle est juste très très douée pour inventer et raconter des histoires. Je pencherais pour la deuxième option. Ouais, même si j'ai vanté dernièrement R.J Palacio, Jérôme Noirez, Lansdale, Robin Hobb est bien la seule qui me fait cet effet-là au point que j'en perde la notion du temps.

Allez, inutile de lui lancer plus de fleurs, car c'est quelqu'un qui n'a plus besoin de pub depuis longtemps ! Taillons-nous à la machette un chemin dans l'histoire ! 

Ayayayayayaya !!!!!
Petit rappel...
...pour ceux qui seraient aussi à la ramasse que moi...

Déjà, pour commencer, passez en mode univers médiéval et oubliez ce qu'est une date !

Les temps sont durs pour les Marchands de Terrilville : les échanges commerciaux ne permettent plus de faire recette, alors chacun se débrouille comme il peut. La piraterie prend de l'ampleur, tandis que le transport des esclaves se développe : après tout, c'est ce qui marche le mieux... Même les vivenefs, les bateaux magiques dont sont équipées quelques familles marchandes de renom, n'impressionnent plus et semblent bien impuissantes face à la réalité économique et politique. Autant dire que les Rivages Maudits n'ont jamais aussi bien porté leur nom.

Dans cette atmosphère de crise et de chaos tout proche, la famille Vestrit se disloque. Althéa quitte la maison à la mort de son père, déçue de n'avoir pas hérité de Vivacia, la vivenef familiale. Cette dernière est revenue à l'odieux Kyle, le mari de sa soeur aînée Keffria ; elle entend bien la récupérer un jour, et la sortir du trafic d'esclaves auquel son nouveau propriétaire la destine. Keffria est moins intrépide que sa cadette ; son but dans la vie, c'est de rester à Terrilville et d'élever au mieux ses enfants Malta et Selden, tandis qu'à bord de la Vivacia, Kyle se charge de l'éducation de Hiémain, leur fils aîné. Or, le jeune homme semble plus attiré par la vie monacale que par celle de marin.

Au large des côtes, le pirate Kennit rêve de s'approprier une vivenef...

Chaussez les besicles !

Où est-ce qu'on en était ? 

Althéa, Brashen et Ambre ont retapé le Parangon, la "vivenef maudite", mutilée et abandonnée par la famille Ludchance ; la voilà prête à partir à l'assaut des vagues après des années passées à griller sur la plage. Comment va réagir Parangon ? C'est la grande question. Tous trois savent très bien que la figure de proue est psychologiquement fragile, imprévisible, voire un peu schizo. Elle peut balancer tout le monde à la flotte sur un coup de tête, et la légende dit qu'elle l'a déjà fait, alors... Mais ils sont aussi conscients que Vivacia est entre les mains des pirates et que cette embarcation de fortune est leur seule et unique chance de retrouver la trace de la vivenef des Vestrit. Ils quittent Terrilville les dents serrées, avec pour compagnie un équipage de criminels...

Faisant fi des liens du sang, Vivacia s'éloigne de Hiémain pour se rapprocher de Kennit ; un lien très fort unit à présent la vivenef et le pirate. En échange de ses cours de lecture, Etta apprend au jeune moine à manier un poignard, car ça peut toujours servir ! Leur escale sur l'île de Partage dévastée par une attaque lui permettra de mettre très tôt en pratique ses nouvelles compétences. Mais c'est sur l'île des Autres que Hiémain va faire basculer son monde en libérant Celle-Qui-Se-Souvient, le serpent de mer qui sera en mesure de rendre leurs souvenirs à tous ses congénères tellement désorientés...

Malta est morose : sa Présentation au Bal d'Eté symbolisant son entrée dans la société des Marchands de Terrilville ne se passera pas comme prévu. Son père ne sera pas là pour l'accompagner comme le veut la tradition, pas plus que son potentiel mari Reyn Khuprus qui ne donne plus signe de vie ; et pour couronner le tout, elle est depuis quelques temps harcelée en rêve par un dragon qui l'assomme de messages incompréhensibles. Elle ne sait pas que, de son côté, Reyn ne trouve plus le sommeil à cause du même bestiau... 


Le livre qui a inspiré Dragons est sorti en format poche.
Avec la couverture qu'on a trop envie de l'acheter _ forcément ! 


Action et manipulation

Les Aventuriers de la Mer sont le théâtre de tout un enchevêtrement d'intrigues, de personnages mus par des motifs divers et variés, impliquant leur peuple, leur famille ou simplement leur ego. Aussi la lecture de "L'éveil des eaux dormantes" ne pouvait-elle appréciable qu'en ayant en mémoire le contenu, ou au moins les grandes lignes, des volumes précédents. Ma grande crainte, c'était de ne pas être en mesure de me rappeler ce que j'avais lu. Pourtant, les connexions se sont faites d'elles-même au bout de quelques pages. Les personnages ont repris vie, les décors se sont relevés au fil des phrases, les enjeux psychologiques et politiques des uns et des autres ont vite retrouvé leur sens.. A croire que le moindre souvenir reste au fond de notre tête sous une forme déshydratée et et ne demande qu'à être ravivé d'un peu d'eau pour récupérer son éclat d'origine. Ce n'est pas Celle-Qui-Se-Souvient qui vous dira le contraire !

Le titre "L'éveil des eaux dormantes" pourrait bien faire référence à l'explosion générale de l'action sur tous les tableaux. Les non-dits et les messes basses laissent la voie libre aux dagues et aux franches prises de bec. Si Althéa nous avait habitués à mettre les pieds dans le plat, si Kennit a toujours eu la gueule en feu et la main qui fourmille au contact du pommeau, ce sont deux personnages habituellement plus empruntés qui vont se révéler, nous surprendre, et même se montrer déterminants pour la suite (et fin) de la série : Hiémain se fait le porte-parole de Kennit, apprend à se battre et libère le serpent de mer de sa prison moisie. Même si on ne saisit pas encore pleinement le lien qui unit les dragons, les monstres marins et les vivenefs, on comprend que son acte _guidé par une pure compassion_ apporte l'une des pièces centrales du puzzle. Malta s'émancipe et n'hésite plus à salir sa robe pour affronter ce mystérieux dragon dans son antre boueuse. Elle devient alors détentrice du souvenir de vies multiples et ancestrales qu'elles n'aurait jamais soupçonnées, et sa clairvoyance du monde qui l'entoure s'en trouve améliorée. Ca aussi, ça peut servir !

Eh oui, méfiez-vous de l'eau qui dort !

 

De la castagne ? Oui, mais pas seulement ! Les romans de Robin Hobb laissent souvent une grande part à la peinture de la psychologie des personnages, à l'écriture de la manipulation. A l'image de Kennit, stratège par excellence, l'auteur de l'Assassin Royal met en scène quelques fameux squatteurs de cerveaux : la Compagne Sérille drogue le Gouverneur pour le mettre dans sa poche et lui faire signer un document qui donnera du poids à ses prises de parole ; Jani Khuprus embrouille son fils Reyn pour l'éloigner du dragon prisonnier. Keffria propose un plan aux Marchands du Désert des Pluies pour sous-tirer des informations aux Marchands de Terrilville. Enfin, Kennit, donc, est le champion en la matière : impatient de posséder pleinement Vivacia et de se débarrasser d'Etta, il tente de précipiter Hiémain dans les bras de la prostituée en leur faisant à tous les deux de vieux sous-entendus. Si bien que "le gamin", comme il l'appelle, finit par se persuader lui-même de ses sentiments pour la favorite de son capitaine. Quand on vous matraque la tête avec la même connerie pendant un certain temps, vous finissez immanquablement par y croire...  

Pff, que dire pour conclure, si ce n'est que derrière chaque personnage de Robin Hobb se cache quelqu'un qu'on connaît (trop) bien ? Je suis assez fan de Robin Hobb, donc mon avis n'aiderait personne à se faire une idée de ce que vaut ce livre, de toute façon. Il me semble que si on pouvait reprocher au précédent de freiner l'action et de limiter les tempêtes et les combats aux boites crâniennes, ce volume plaira autant aux amateurs de baston qu'à ceux qui aiment bien cogiter.


ROBIN HOBB. Les Aventuriers de la Mer, tome 6 "L'éveil des eaux dormantes". J'ai Lu, 2006. 414 p. ISBN 978-2-290-35692-0