lundi 28 juillet 2014

Larme de rasoir : Wonder - R.J. Palacio (2012)


Et qui c'est qui vient vous parler d'école 
en plein milieu des grandes vacances ???

C'est bibi !!!!

Pour vous servir ! 

Après avoir lu intégralement Mon ami Dahmer (Derf Backderf) à la FNAC des Halles, j'étais tellement retournée que, tel un gosse, je me suis dit qu'il me fallait absolument un cadeau pour me consoler ! 

Après lecture des première pages, j'ai opté pour ceci :   

Wonder - R.J. Palacio
Oui, je sais, ma légende ne sert à rien, c'est déjà marqué.

L'histoire 

August Pullman est un garçon presque comme les autres : il aime les jeux vidéos, sa Xbox, Star Wars, le foot et faire du vélo. Tout irait bien si un chromosome récalcitrant et une succession de bugs génétiques ne l'avaient pas fait naître avec un visage difforme. Résultat, du haut de ses dix ans, il effraie bien malgré lui tous ceux qu'il croise sur sa route.. Difficile de se faire des amis dans ces conditions.

Afin de le protéger de la maladresse et de la cruauté des autres enfants, ses parents ont choisi de ne pas l'inscrire à l'école primaire. Mais ils sont également conscients qu'August devra un jour ou l'autre affronter la réalité pour espérer se sociabiliser malgré sa face ravagée. Alors, puisqu'il a l'âge d'entrer en 6°, ils décident finalement de l'inscrire dans un collège pas trop grand et tout proche de chez eux ; le petit Quasimodo des temps modernes est cent fois plus flippé que les autres élèves de 6°. Survivra-t-il jusqu'au prochaines grandes vacances ? Wonder retrace ses efforts quotidiens pour s'intégrer dans son bahut malgré son physique repoussant.

Et là, vous vous dites : "Mais c'est n'importe quoi ! il va se faire laminer, insulter, arracher ce qui lui reste de potable sur la gueule, cracher dessus, taper, et ainsi de suite jusqu'à nous faire au mieux une phobie scolaire, au pire une fusillade !Petite précision : ça se passe aux Etats-Unis. Comme le dit très bien Nate, le père d'August, plutôt contre l'idée de voir son petit monstre quitter le cocon familial au début du roman, on a l'impression que le jeune héros est entraîné dans son école "comme un agneau à l'abattoir".

Histoire de bien vous achever avant de commencer à lire vous-même le livre, je vous fais partager quelques bribes de la présentation d'August par lui-même, dans le premier chapitre :

"... je me sens normal. Au-dedans. N'empêche, lorsqu'un enfant ordinaire entre dans un square, les autres enfants ordinaires ne s'enfuient pas en hurlant." [...] "J'aimerais pouvoir marcher dans la rue sans que tout le monde me regarde et puis détourne les yeux à toute vitesse." [...] "Je ne me décrirai pas. Quoi que vous imaginiez, c'est sans doute pire."

Alors oui, pleurez, pleurez ! Vous pisserez moins.





Mais attendez un peu avant de vous pendre 

Si on lui enlève sa tête, la vie n'est pas si moche que cela pour August : chouchouté par une famille aimante, plutout bien richouze, surveillé de près par une grande soeur très protectrice, il ne manque de rien matériellement, et il est très intelligent. De plus, si son entrée au collège est truffée de réactions négatives _de la part des enfants comme des adultes, on repère vite son naturel positif et sa faculté à ne pas se laisser abattre.

Evidemment, on devine que tout ne va pas être rose pour lui, car la bonne volonté a toujours ses limites ; et il faut reconnaître que ses jeunes années passées à l'écart des autres l'ont maintenu dans une certaine immaturité qui le dessert. August va accueillir de nombreuses brimades, se faire trahir par ses "amis", expérimenter diverses déception et faire les frais de coups en douce.. comme n'importe quel autre collégien, en somme. Au fil des pages, on s'aperçoit que sa différence pèse de moins en moins dans la balance, même si elle crève l'écran et demeure en toile de fond... mais il faut bien faire avec !

Quoiqu'il en soit, ne craignez pas de vous déshydrater des yeux : Wonder raconte une histoire réaliste sur la différence et la prise en compte du regard de l'autre, mais finalement drôle et optimiste. Sa grande force réside, à mon avis, dans la polyphonie : les aventures d'August sont organisées en différentes parties, écrites tour à tour par le héros lui-même, puis par Via, sa soeur, par Summer et Jack, ses amis, par Miranda et Justin, les amis de Via. Cette alternance des points de vue nous permet d'avoir des versions différentes d'un même événement et facilite la compréhension ; du coup, le lecteur en sait plus que le héros à certains moments du récit, et ça ne manquera pas de le tenir en haleine jusqu'à la fin de l'histoire.

Quant à la profondeur et la justesse des personnages, elle participe au succès grandissant de ce "petit" bouquin que 500 pages qui se lit très facilement. Personnellement, en cinq heures de train c'était "plegat", comme dirait la mémé, et je ne suis pas une rapide.

Chacun des personnages principaux fait l'objet d'un rapide portrait en début de chapitre.
August 
Je ne veux pas trop en dire sur lui, afin de vous faire votre propre idée du personnage. Tout ce que je peux dire, c'est qu'on a la chance d'avoir une illustration _même incomplète_ de lui pour nous guider dans la représentation mentale qu'on peut s'en faire. Quand j'ai lu que la fête préférée d'August, c'était Halloween, parce que forcément, il n'avait pas besoin de se cacher ce jour-là, j'ai aussitôt pensé au film Quasimodo D'el Paris. En particulier à la scène en boite de nuit, où Quasimodo va faire la fête en douce, au milieu d'un peuple festif tout déguisé. Sans ces petits dessins, j'aurais donc lu tout le livre en imaginant le héros avec la tête de Patrick Timsit, vous vous rendez compte ?


"C'est la fêêêête"

Via, la soeur d'August
Eh ben ! C'est elle qui aura réussi à me faire pleurer en lisant un livre, ce qui n'était pas arrivé depuis dix ans, et ces putains de Hauts de Hurlevent ! Via a 15 ans, elle vient d'entrer au lycée ; si elle adore August et passe son temps à le protéger, elle souffre de l'inévitable manque d'attention de ses parents. Ils sont trop occupés par la santé et le bien-être du plus jeune pour remarquer toutes ses qualités. Alors, forcément, elle est contente de se faire de nouveaux amis au lycée et de pouvoir commencer à vivre pour elle-même, mais elle culpabilise aussi : n'est-elle pas, elle aussi, en train de rejeter son frère ?
Via est le personnage le plus complexe et le plus réussi de Wonder.   

Summer, la meilleure copine d'August
Elle le prend sous son aile dès le premier jour de classe, et lui fait remarquer qu'ils ont tous deux des "prénoms d'été". Complètement barrée, elle me fait penser à Cythia, la copine de Malcolm, dans Malcolm, donc.



Jack 
Ah, Jack ! On en a connu plein, des comme ça ! Le gars faussement modeste mais charismatique, que toute la classe aime bien, et qui a réussi à rentrer la population mondiale dans la poche de son blouson en jean. A tel point que le principal du collège lui-même lui a demandé d'accompagner August durant les premiers jours de classe pour l'aider à s'intégrer. Du coup, Jack joue son rôle de tuteur auprès du petit Elephant Man local, qui pense avoir trouvé en lui un véritable ami. Sauf que, tout beau gosse qu'il est, Jack est pris entre deux feux : d'une part, il se prend au jeu et s'attache réellement à ce nouvel élève hors du commun ; et d'autre part, il sait très bien que s'il s'affiche trop souvent avec August, classé d'office dans les loosers pestiférés du collège vu sa tronche, sa popularité va en prendre un coup et il va perdre la plupart de ses copains. Cruel dilemme que d'assumer ou pas la sympathie qu'on a pour quelqu'un ! Nombreux sont ceux pourraient méditer là-dessus, bien qu'ils aient quitté le collège depuis longtemps !


Remise des prix et distinctions en tous genres 

Si j'ai cru bon de le classer dans la catégorie "larme de rasoir", je ne compte pas lui attribuer le "Prozac d'or".



Bien qu'il soit émouvant, bien qu'il sonne juste, Wonder est un roman pour enfants plein d'espoir. Seul bémol, la fin de l'histoire est un peu trop niaise à mon goût, et mérite à elle seule le label Monde des Bisounours.


Allez, je n'en dirai pas plus pour pas spoiler.

Une histoire à lire à tout âge, à faire lire tout le monde, bref, à mettre entre toutes les mains ! 


PALACIO R.J. Wonder. Pocket Jeunesse. 2012. 506 p. ISBN : 978-2-266-24962-1


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