vendredi 28 septembre 2012

Les Aventuriers de la Mer - 3 - La conquête de la liberté. Robin Hobb (1998)


C'est sans me faire prier que je me suis directement attaquée aux troisième tome des Aventuriers de la Mer, "La conquête de la liberté", malgré ma ferme intention de mettre fin à la lecture et à l'étude du Seigneur des Anneaux de Tolkien. A croire que je ne lirai jamais Bilbon le Hobbit avant la sortie du film ! C'est frustrant au possible, mais il faut bien reconnaître que les navigateurs des Rivages Maudits en valent largement la peine.


Où est-ce qu'on en était ?  


Les esclaves retenus prisonniers d'un navire magique se libèrent, se débarrassent de leurs geôliers, et prennent à l'aveuglette les commandes de l'embarcation. Alors que le chaos est à son comble, un vaisseau de pirates arrive à leur hauteur et les aborde sans crier gare : le massacre ne pourra être évité, de part et d'autre. Comme si cela ne suffisait pas, une tempête d'une violence extrême s'abat sur les deux bicoques à feu et à sang, pour le plus grand bonheur des serpents de mer mangeurs de cadavres !

Soyez les bienvenus dans l'univers de Robin Hobb, ou les heures de pointe aventurières succèdent à la calme angoisse des femmes de marchands, à Terrilville.   


Autant le titre du tome 2 « Le navire aux esclaves » me paraissait mal décrire l'ouvrage, autant « La conquête de la liberté » est une formule qui prend tout son sens lorsqu'on la place en tête de ce troisième volume. Qui ne cherche pas à se dégager d'une emprise quelconque dans les pages qui suivent ? Personne, à vrai dire.

Hiémain profite de l'escale à Jamaillia pour fuire la Vivacia, au moment où on doit remplir les cales du navire d'esclaves. Il compte trouver le soutien de prêtres, mais n'arrivera qu'à se faire emprisonner. Althéa tombe de haut : alors qu'elle faisait le bonheur du Moissonneur sous le nom d' »Athel », l'équipage la rejette en apprenant qu'elle est une fille. Au port de Chandelle, Brashen lui fait des avances qu'elle refuse : l'engagement, très peu pour elle. Sa liberté sentimentale, elle y tient. Malta, sa nièce, séduit sans le vouloir le fils cadet d'une famille de Marchands du Désert des Pluies, au grand désespoir de Ronica et Keffria.

La chance ne peut pas opérer à tous les coups, même quand on a une amulette en bois sorcier ! Le capitaine Kennit en fait les frais. L'attaque d'un vaisseau d'esclaves ne se passe pas comme prévu, et un serpent de mer lui mord la jambe, lui instillant du venin. Etta arrive à temps pour trancher le membre blessé et stopper l'effet du poison ; maintenant, il va falloir que Kennit, estropié, diminué, fiévreux, arrive à se convaincre qu'il s'en est finalement très bien tiré. Sa blessure ne l'empêche pas de s'accrocher à son grand rêve : attaquer et posséder une vivenef. Justement, la Vivacia est en vue. Troublée par les serpents de mer sui l'escortent, par la présence d'hommes maltraités dans ses cales, par la décrépitude de Hiémain, par la violence de Kyle, elle ne sais plus guère fendre les vagues. La libération des esclaves, entraînant la mort d'une grande partie de l'équipage, l'affole encore plus. Du pain béni pour la Marietta de Kennit qui n'en demandait pas tant.



Héros et amputations

Dans le tome précédent, l'amputation du majeur de Hiémain nous avait été présentée comme un acte héroïque : le jeune prêtre y avait vu une occasion de se mettre en valeur, et de tester les limites du courage de son père en le priant de se charger lui-même de la découpe. L'acte s'était même alourdi d'une portée symbolique, le doigt sacrifié étant celui destiné à recevoir son futur anneau de prêtrise.  
Aussi, lorsque Kennit se fait happer la jambe par un serpent de mer dans "La conquête de la liberté", il est bien difficile de ne pas y voir un écho, vite confirmé par la rencontre des deux protagonistes en fin d'ouvrage ! Les similitudes de leurs expériences respectives aura l'avantage de souligner leurs grande différence de caractère. Si le petit Hiémain choisit raisonnablement de perdre son doigt pour se sauver, Kennit s'accroche à sa jambe empoisonnée et reproche aussitôt à Etta de lui avoir tronçonnée une partie de son corps déjà en charpie. Une fois de plus, Robin Hobb peuple ses royaumes imaginaires de personnages assez humains pour avoir peur de la souffrance et de la mort.

Pourtant, dans les univers médiévaux de la fantasy, l'amputation est perçue positivement. Elle fascine, elle effraie, et elle impose le respect parce qu'elle témoigne de la véracité d'un exploit guerrier. Dans le film d'animation Dragons (2010), le héros Harold dresse un dragon qui a perdu une aile, et lui fabrique une prothèse ; à la fin de l'aventure, lui-même perdra un pied et n'en manifestera pas de grande tristesse. D'ailleurs, comme il l'affirme lui-même au tout début du film, les cicatrices et blessures de guerre pèsent lourd dans la balance lorsqu'il s'agit de plaire au filles.

Harold, Astrid, Krokmou

Le roi Fergus, père de Mérida dans Rebelle (2012), porte une jambe de bois depuis ce fameux face à face avec un ours qu'il raconte sans cesse, non sans fierté, bien qu'il ne soit pas vraiment venu à bout de l'animal. Il attend d'un ferme pied de bois la revanche qui le verra à coup sûr victorieux. Loin d'effrayer les jeunes spectateurs, sa particularité physique donne lieu à une farandole de blagues tout au long du dessin animé.  


"Mon passage préféré, c'est pas juste !"

Pour faire écho à Kennit larmoyant et infecté, on aurait fort à dire sur la représentation courante du pirate, toujours affublé d'une crochet de fer, d'une jambe de bois ou d'un bandeau sur l'oeil !

Références :

  • Andrews, Mark ; Chapman, Brenda. Brave. Disney - Pixar, USA. 2012. 95 min. 
  • Delbois, Dean ; Sanders, Chris. How to train your dragon. Dreamworks Animations, USA. 2010. 98 min.
  • Hobb, Robin. Les aventuriers de la mer. "La conquête de la liberté". Paris. France Loisirs. Coll. "Piment". 1998. 432 p. ISBN 2-7441-6100-4 





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