mercredi 13 avril 2011

Un Coupable Idéal - Jean-Xavier de Lestrade (2001)

           Alors que je m'étais plongée dans Le Passage de Louis Sachar, et que je suivais le cheminement du jeune Stanley dans sa nouvelle vie bouleversée par une erreur judiciaire, une impression de déjà-vu est venue me perturber dans ma lecture. En réfléchissant quelques minutes, j'ai compris que son origine résidait dans le visionnage, il y a quelques années, d'un documentaire désormais célèbre : Un Coupable Idéal, de Jean-Xavier de Lestrade. 


            
Un fait divers, une enquête, un accusé
               Jacksonville, en Floride. Un dimanche matin, un couple de touristes retraités est agressé par un jeune homme, devant l'hôtel où ils séjournent. Il tente d'arracher le sac à main de la femme, elle résiste, il brandit une arme et lui décoche une balle dans la tête avant de prendre la fuite. La police est aussitôt alertée, et inspecte les environs. A quelques rues de là, Brenton Butler, un afro-américain de 15ans, se rend chez le disquaire afin de postuler pour un boulot. Les agents le croisent et lui demandent s'il accepterait de venir au commissariat pour témoigner, dans le cadre de cette affaire. Une fois au poste, le mari de la victime a la certitude de reconnaître en lui le meurtrier de sa femme. La culpabilité de Brenton Butler paraît tellement évidente que l'enquête va être complètement négligée.

             J'ai vu Un Coupable Idéal en 2004; cela me paraît très loin car j'essaie encore d'oublier cette période. Ce documentaire avait déjà 3ans d'âge lorsque la prof d'anglais nous a projeté ce documentaire pendant un cours, sans nous donner aucune explication, sans doute pour ne pas influencer notre jugement et nous laisser mener notre propre réflexion en vue d'un débat prévu à la séance suivante. Elle a sans doute bien fait. Sur le moment, on était excités comme des gosses de voir qu'on allait se la couler douce pendant toute l'heure, et même une partie de celle d'après. En plus, c'était doublé en français. Que demander de plus? 

                Un avocat se charge de la défense de Brenton Butler, qui entre-temps, est passé aux aveux sous la menace. Il relève aussitôt des failles dans l'enquête, dues à des approximations, à des incohérences, et à de nombreux oublis qui ont bien arrangé toute le monde. 

L'erreur est humaine, la vérité est dans le cadavre à disséquer.  
          Si notre prof ne nous a donné aucune information, c'était pour qu'on prenne conscience par nous-même de la force des préjugés auxquels nous-mêmes, malgré notre bonne volonté d'humains, nous n'échappons pas.
            
            Ici, on constate que les policiers ont admis avoir eu quelques soupçons sur Brenton au moment-même où ils l'ont croisé en voiture, et ce, pour une simple question de couleur de peau. Alors, chacun sera tenté de penser : "mais qu'ils sont cons, ces flics!" Personnellement, si on me dit qu'un jeune gars vient de voler le gloss à paillettes d'un bonhomme à côté de chez moi (oui, pourquoi il n'y aurait que les filles qui devraient se tartiner la gueule?), et que je croise une jeune gars dans la foulée, je vais d'abord penser que c'est lui. Ensuite, vient le réflexe d'aller chercher plus loin, mais ce n'est que le réflexe n°2. C'est extrêmement fâcheux, voire extrêmement con, mais j'ose prétendre que c'est humain et que je ne serai pas la seule à faire un rapprochement hâtif. A moins que je sois vraiment beaucoup plus conne que la moyenne, ce qui est possible. Laissez-moi seulement espérer que je le suis un peu moins qu'un poulet. Pour ceux qui ne prennent pas la peine de mettre en place le réflexe n°2, il y a heureusement un système judiciaire qui réfléchit à leur place.

           Quant à l'accusation spontanée du vieux touriste qui vient de voir sa femme se faire descendre sous ses yeux, on peut bien sûr lui reprocher de s'être "trompé de Black", si l'on peut dire, et d'avoir assimilé tous les Noirs à des assassins. Mais il ne faut pas perdre de vue que quand on se fait agresser, on voit son agresseur partout pendant très longtemps. Sans doute est-ce humain aussi. D'où l'intérêt d'avoir une justice, des flics des enquêteurs opérationnels et un minimum consciencieux, en complément de cette humanité dégoulinante. 

             Il y a forcément un moment où le spectateur du documentaire fait face au spectateur du procès de Brenton Butler; il y voit des regards plein de certitude, qui se mettent à douter, qui hésitent franchement, et finalement prennent conscience de la gravité de l'erreur judiciaire. Qui ira chercher la vérité derrière ce qui ressemble à s'y méprendre à une certitude? Sur fonds de préjugés, de racisme et de paperasse mal gérée, c'est une critique du système judiciaire et .. peut-être de la peine de mort, aussi, qui se dessine. Parfois les erreurs sont irréparables. 

Voici La fiche pédagogique de Télédoc, qui est "le petit guide télé pour la classe" édité par le CNDP, parce que ça ne peut pas faire de mal!  

            Cette prof ne m'a pas laissé un souvenir très bon, sans doute à cause de mon humeur du moment, peut-être aussi parce que j'étais jalouse de son énergie inépuisable : elle était extravertie, extravagante, explosive, ses gros yeux de chouette avaient l'air de connaître tout le monde. En bref, extra-soûlante pour quiconque aurait bien aimé être ailleurs qu'en cours d'anglais. Mais elle était toujours très bien inspirée lorsqu'il s'agissait d'aborder les "questions socialement vives", comme on dit, car elle ne craignait pas de s'engager. Je pense qu'elle nous a beaucoup appris sur la culture des pays anglophones. Ouais, c'est bien ça, si je n'aimais pas avoir sa tronche dans mon champ de vision, c'est parce que j'étais jalouse d'elle.    


Un Coupable Idéal - Jean Xavier de Lestrade (2001)
111min 
Un Coupable Idéal est accessible sur Dailymotion (6 parties)
            
                         


  

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